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Chronique : Le Grand Débat # 05: Le jeu video peut-il connaître la crise?

Le grand débat - Par Ashram - 30 Janvier 2009 11:54:22

Ici Jean-Pierre Gaillard en direct de la Bourse de Paris.

En cette sombre période, il est d'usage de céder à la panique générale qui veut que nous soyons foutus. Bah c'est qu'en fait on l'est, sauf qu'on le savait déjà. Travailler jusqu'à soixante-dix ans c'est pas à cause de la crise. Se faire virer parce que quelques vieux cons en Floride veulent acheter un nouveau bungalow et que notre société ne leur verse pas assez de dividendes, ce n'est pas nouveau. Payer quinze euros (oui quinze euros ça fait bien cent balles) un morceau de steak c'est pas nouveau et c'est un peu ça aussi le luxe.

La vie est chère ma pauvre Lucette et c'est sans doute la faute à l'Euro, même si certains nous répondront que les Anglais regrettent aujourd'hui amèrement de ne pas être passés à la monnaie Européenne quand on voit comment leur Livre se pète la gueule.

Mais le sujet aujourd'hui n'est pas de faire de la politique de comptoir, même si la tentation est grande je dois l'avouer. Et puis après tout on ne tire pas sur les ambulances: les banquiers sont devenus les premiers fonctionnaires de l'Etat et Sarko est sous Xanax parce apparemment quand il y a une grève ça se voit de nouveau.

La question qui nous intéresse, nous pauvres Geeks, Nerdillons, No-Lifes, c'est de savoir à quelle sauce nous allons bien pouvoir manger nos jeux préférés. Dans le domaine de la technologie, on nous dit que les prix baissent. C'est un fait: acheter une télé H.D. est moins cher aujourd'hui qu'hier, les coûts des composants baissent, un disque dur ne vaut guère plus qu'une soirée au resto, et les exemples sont nombreux.

S'il y a pourtant un secteur qui n'a pas ou peu profité de ces baisses, c'est le jeu vidéo, entre autres. On nous répondra que les acteurs sont au taquet: Sony est pour l'instant au maximum de ce qu'il peut faire s'il veut éviter de perdre encore plus d'argent sur chaque Playstation 3 vendue, Microsoft n'est pas loin de payer pour que les gens achètent sa Xbox 360 tant elle est donnée, et seul Nintendo peut se permettre de vendre ses consoles hors de prix tant la demande est là.

A voir les bons chiffres du secteur, on pourrait se dire que le jeu vidéo ne connaît pas la crise. Et pourtant ces chiffres sont peut-être l'arbre qui cache la forêt...

Si les consoles de salon sont relativement épargnées par le piratage, grâce à des astuces comme le support (Blu Ray encore cher, rareté des graveurs), le Online (blocage des consoles flashées par Microsoft, difficulté pour utiliser le Xbox Live), ou encore la ludothèque (qui veut pirater les jeux de la Wii alors qu'on peut pirater les mêmes jeux sur DS ou y jouer en flash sur le web?), les portables sont en revanche touchées depuis longtemps par le phénomène. La PSP pâtit directement de ce piratage massif puisque les ventes de jeux sont inversement proportionnelles aux bonnes ventes hardware. Pour la Nintendo DS le problème est légèrement différent puisque, bien que plus facile d'accès, le piratage reste encore méconnu du grand public, et que les chiffres se noient plus facilement dans l'océan des ventes de consoles.

Dès lors, qu'est-ce qui tient le marché? Le public casual ne nous y trompons pas. Est-ce positif ou négatif? Je ne saurais répondre à la question. J'aurais envie d'y voir du positif si seulement l'argent dégagé servait les intérêts du marché, et la création. Malheureusement, on sait tous que cet argent est immédiatement réinvesti dans d'autres productions casual.

C'est un peu comme le soutien actuel aux banques: l'Etat leur donne de l'argent, mais elles préfèrent se le réinjecter entre elles ou conforter leurs profits plutôt que de l'envoyer dans l'économie réelle via les prêts aux particuliers ou aux entreprises. Fin de la parenthèse.

Le jeu vidéo sur Next-Gen, c'est toujours soixante-dix euros en France. Le marché travaille à flux tendu et personne ne semble vouloir lâcher sur les prix, hormis quelques opérations ponctuelles, ou suite à des ventes décevantes, comme Mirror's Edge dernièrement. Les développeurs, bien conscients de cette situation, ont deux solutions: se refaire une santé en vendant de la merde sur Wii ou DS, ou bien proposer autre chose sur des modes de distribution directs comme le Playstation Store, le XBox Live Arcade ou le WiiWare dans une moindre mesure.

Avec des coûts de production qui explosent, et des ventes moins assurées que par le passé, il ne fait pas bon prendre des risques. Pour l'instant les calendriers sont encore pleins de titres prometteurs, mais il faut savoir que les jeux se trouvant sur ces plannings sont des jeux dont le développement a commencé il y a trois ou quatre ans, donc avant la crise. Le problème risque de se poser pour les jeux dont la production a démarré l'année dernière, ou démarre en ce moment. Ce sont les jeux auxquels nous joueront d'ici deux-trois ans. Est-ce que cela se ressentira sur la qualité? Les moyens?

Un début de solution a déjà été trouvé: la fin des exclusivités. Meilleur exemple: Final Fantasy XIII. Véritable blockbuster à la production titanesque et aux coûts de développement démesurés. Est-ce que ce développement aurait pu continuer dans ces conditions? Je ne le crois pas. Des centaines de personnes, des millions de Dollars: il faut être sûr de vendre. Même si la licence est vendeuse, se reposer sur cette réputation ne suffisait plus. On sent la tendance se poursuivre, avec dernièrement l'annonce de la fin d'exclusivité de Mass Effect, véritable non-évènement tant ça semblait logique.

Il n'y a guère que les jeux first party qui pourront tirer leur épingle du jeu, mais là encore ces jeux ont un coût et les mécènes, comme Sony avec Naughty Dog par exemple, ne pourront pas supporter éternellement de vendre à perte, surtout dans ce contexte économique.

Heavy Rain, le prochain Fumito Ueda, les prochaines productions Kojima: un gros point d'interrogation plane sur eux? Même du côté de chez Nintendo la tendance se confirme: ne toujours pas avoir eu de moindre information quant à un prochain Zelda est assez significatif de la tension actuelle. Il faut dire que Nintendo n'a pas trop à s'en faire sur sa santé financière, et au pire ils feront un Zelda low tech en reprenant le moteur de Twilight Princess, pour le plus grand malheur des fans.

Ce qu'il faut redouter, c'est l'explosion des productions casual, et pas seulement chez Nintendo, et l'avènement d'un nouveau modèle économique basé sur la mise en avant du grand public avant tout.

Ou alors c'est exactement l'inverse qui peut se passer: le grand public, peu passionné de jeu vidéo et ayant tâté de ceux-ci par opportunité avec les phénomènes de mode Wii et DS, va faire des choix et des priorités à cause de la crise financière. Ils vont peu à peu délaisser cette façon de jouer, et la poule aux oeufs d'or va être tuée à petit feu.

Il sera alors amusant de voir Nintendo essayer de revenir vers ses fans de la première heure, et de voir comment le marché va essayer de retrouver une nouvelle fois un modèle économique stable et porteur.

Finalement c'est quoi l'avenir? La distribution type App Store, la fin totale et programmée du "hardcore gaming" ou alors un retour vers passé, avec des jeux moins ambitieux mais plus en phase avec les attentes des gamers?

Et vous, quel est votre avis? Pensez-vous que la crise touche ou peut toucher le marché? Pensez-vous que le phénomène casual gaming va encore s'accentuer ou au contraire pensez-vous que tout va bien et que l'avenir est prometteur?



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